Du bon usage des chiffres
Les chiffres donnant l'apparence de l'objectivité et de la précision, et étant par ailleurs très faciles à produire et à commenter à l'infini, les médias adorent. En période électorale, on n'échappe donc pas à la sondagite, et à son éternel usage sans précaution.
Le 20 février dernier, scoop, un sondage donnait enfin le candidat S. devançant le candidat S. (l'autre), avec 26% d'intentions de vote contre 25. Nombre de commentateurs se sont alors lancés avec délectation dans l'interprétation divinatoire de l'oracle. On parla de frémissement, de renversement de tendance, de signes faibles mais qui...
Regardons d'un peu plus près en quoi consiste l'information source: il s'agissait d'un sondage portant sur le standard médiatique classique d'approximativement 1000 personnes (l'« approximativement 1000 » descendant ici à 876).
D'après les rudiments des statistiques (auxquels on peut s'exercer grâce au bel outil en ligne de l'OZ Prozstat) on apprend que pour un test sur 1000 échantillons, si l'on vise un risque de se tromper de moins de 5% (i.e. une fois sur 20 sondages), alors la marge des réponses est de plus ou moins 3,2%. C'est à dire que la façon complète de présenter le résultat du sondage aurait été: « S. fait un score entre 22 et 28% tandis que S. fait un score entre 23 et 29%, avec 95% de chances que ces fourchettes soient justes ».
À partir de là, que penser de la validité des analyses journalistiques qui suivirent ?
Fabrice Neyret
Références :